Socialistes: Remarquable Fluckiger dans l'Alsace

Par Patrick Fluckiger. - À gauche toute ! Au PS, c’est un bon moyen de rassembler les troupes. Martine Aubry l’a bien compris, qui a fait adopter hier un projet de société que n’auraient pas désavoué les frères ennemis communistes, du temps de Georges Marchais : le maintien de la retraite à 60 ans y figure en bonne place, ainsi que la création de « pôles » industriels et financiers publics, qui rappellent furieusement les nationalisations de feu le Programme commun de la gauche, signé en 1972. En avant vers le passé, en somme. Et pour mieux enfoncer le clou, la dame des 35 heures a lancé une violente diatribe contre Nicolas Sarkozy, qu’elle a notamment comparé à l’escroc américain Bernard Madoff. Succès de tribune assuré !

L’unanimité des 500 délégués sur ce programme très général a permis à Martine Aubry d’affirmer que « le bal des egos est terminé » et que les socialistes sont désormais unis pour commencer « le vrai travail ». On verra ça mardi, quand ils débattront de l’organisation de la primaire pour désigner le candidat à la présidentielle de 2012 ! Les débats s’annoncent moins consensuels. Ségolène Royal a, paraît-il, « normalisé » ses relations avec Martine Aubry. Ça ne l’a pas empêchée d’aller se faire interviewer hier soir sur France 5 pour ne pas se faire oublier. Les egos socialistes ont toujours été plus à l’aise devant les caméras que dans les salles de bal.

Sur le fond, on souhaite bien du courage aux militants. Martine Aubry peut-elle promettre des nationalisations quand le gouvernement Jospin, auquel elle a appartenu, a été celui qui a le plus privatisé en France ? Est-elle crédible quand elle affirme qu’elle rétablira la retraite à 60 ans, alors que ce sont des gouvernements socialistes qui reculent l’âge de départ à 65 ans en Grèce et à 67 ans en Espagne ? De Léon Blum en 1936 à Lionel Jospin en 1997, en passant par Guy Mollet en 1956 et François Mitterrand en 1981, les socialistes ont toujours conquis le pouvoir par la gauche. Mais la conduite à gauche ne leur a jamais réussi : de la « pause » du Front populaire au « tournant de la rigueur » de 1983 – initié par Jacques Delors, le père de Martine Aubry… — « l’irréalisme » dénoncé hier par Gérard Collomb, le maire de Lyon, a toujours fait place, rapidement, à la… déception. Puisqu’on en est au remake des années soixante-dix, autant rappeler ces vérités.