Audrey Pulvar et Arnaud Montebourg à Perpignan, le 2 septembre 2011 (F.LANCELOT/SIPA).
J’ai mis un peu de temps à additionner 2+2 pour obtenir 4. Mais je dois me rendre à l’évidence : Audrey Pulvar et Arnaud Montebourg qui, jour après jour, défraient la chronique de l’ensemble des médias et qui alimentent les réseaux sociaux par leurs frasques, sont "le" couple "bling bling" de la gauche. L'épisode de la marinière est le dernier en date.
Qu’ils le fassent exprès ou qu’on les y pousse, le résultat est le même : ils semblent mettre l’essentiel de leur énergie à offrir le visage navrant d’un duo trop flamboyant, trop imbu de lui-même, trop en dehors des réalités que vivent quotidiennement les Français.
De quoi écorner l’image du socialisme au pouvoir, au moment où le minimum qu’on serait en droit d’attendre de ses représentants serait de la sobriété, voire un peu de décence.
L’impudeur des années fric
Au lieu de cela, il y a comme du déjà vu dans cette exposition permanente, qui rappelle l’impudeur des années fric et la goujaterie des personnalités en place sous le quinquennat précédent.
Ainsi, la directrice de la rédaction des "Inrocks" est à la presse écrite ce qu’hier Carla Bruni était à la chanson : une jolie femme de la télévision qui débarque dans une aventure de presse écrite qu’elle n’a jamais fréquentée (la voilà directrice des "Inrocks") quand hier, la belle mannequin s’était retrouvée sans réelle préparation à pousser la chansonnette avec une guitare.
Et que dire du ministre du Redressement productif qui passe ses journées à pérorer à la télévision et à jeter des anathèmes sans rien obtenir pour les ouvriers qu’il est censé défendre !
Avec sa marinière et son sourire de star satisfaite d’elle-même, on dirait un top model plutôt qu’un membre du gouvernement de Jean-Marc Ayrault. Et il suffirait qu’il se laisse pousser une barbe de trois jours pour donner le sentiment que, comme Nicolas Sarkozy, il est en vacances et qu’il coule des jours heureux. Ça fait désordre.
Un mannequin de Jean-Paul Gaultier
J’étais en train d’écrire mon billet vengeur sur Karl Lagerfeld, samedi matin, quand cela m’a sauté aux yeux : il y a comme une irresponsabilité commune entre d’un côté le couturier qui taille un méchant costard à François Hollande dans l’édition espagnole de "Marie Claire" et Arnaud Montebourg qui pose à la une du "Parisien Magazine" dans le but tout à fait contre-productif de servir l’industrie française.
D’abord, parce que ce n’est pas à la marque bretonne Armor Lux que l’on songe quand on le voit ainsi habillé mais plutôt au couturier Jean-Paul Gaultier. Et l’on ne peut s’empêcher de penser que Montebourg, qui paraît être un homme rusé, ambitieux, sûr de ses compétences et amoureux de lui-même, y a peut-être vu le moyen de se mettre en valeur.
C’est réussi, il est beau, il est à l’aise dans sa marinière à 50 euros, mais l’on imagine le résultat auprès des ouvriers de Florange ou de PSA qui vont le voir dans cet accoutrement plutôt people : ils vont hurler à la mascarade, voire à la provocation. Et ils auront raison !
Car il faut être sacrément préoccupé par sa propre personne pour ne pas imaginer l’impact que va avoir cette image "bling bling" sur les Français qui attendent de lui des actes et non pas ce genre de manifestations stériles et légères comme des bulles de champagne.
Arnaud Montebourg a beau réclamer de la patience sur France 2 et dire que "c’est à la fin de la foire qu’on compte les bouses", on ne peut que constater l’ampleur du désastre : les plans sociaux s’accumulent, les salariés sont licenciés par milliers chaque semaine en France et, pendant ce temps, le ministre du Redressement productif semble non seulement faire la foire à la une de la presse magazine mais aussi y prendre goût.
Bouc émissaire, mais pas malgré elle
Le pire, c’est que cette impuissance arrogante qui se dégage de cette personnalité politique fascinante et flamboyante n’est absolument pas compensée par une attitude modeste que l’on pourrait attendre de la compagne d’un ministre. Il faut dire qu’Audrey Pulvar est elle-même une personnalité hors du commun qui, elle aussi, aime être dans la lumière.
Le site Terrafemina a beau se poser la question "Audrey Pulvar bouc émissaire malgré elle ?", j’ai la conviction que c’est non seulement avec son consentement mais aussi qu’elle en tire satisfaction, sinon, voilà longtemps qu'elle aurait choisi la discrétion. Il suffit, pour s’en convaincre, de faire un petit retour en arrière, rien que sur ces derniers mois.
Il y a d’abord ce désir incompréhensible de vouloir rester chroniqueuse politique à la télévision dans l’émission de Ruquier, "On n’est pas couché" alors que son compagnon est devenu ministre, comme si elle ne comprenait pas qu’elle devait sinon changer de métier, du moins changer de spécialité.
Il y a ensuite cette obsession de vouloir intervenir dans le débat public, et donc politique, par exemple dans l’émission "Le Grand 8" sur D8 quand elle s’autorise, en oubliant sa propre situation, à donner des conseils à Valérie Trierweiler qui hésite encore entre son désir de rester journaliste et celui de tenir son rôle de Première dame.
Des "conseils" à Valérie Trierweiler
Aujourd’hui, alors que la compagne de François Hollande a finalement fait son choix avec dignité, on ne peut s’empêcher de faire la comparaison avec Audrey Pulvar, prompte à lui donner des leçons (aujourd’hui à la télévision comme hier sur Twitter au moment du "tweetgate") mais pas à tirer pour autant les conséquences de sa propre ambiguïté.
En fait, la directrice des "Inrocks" donne le sentiment de vouloir tout, le beurre, l’argent du beurre et le reste. On pourrait penser que cette volonté d’exercer un métier de passion, de rester dans la lumière des plateaux de télévision, de gagner de l’argent soient des revendications à la fois légitimes et féministes.
Pourtant, bien que je ne connaisse pas personnellement Audrey Pulvar, j’ai plutôt le sentiment que tout son "bougisme", toute sa logorrhée verbale, sont plutôt l’expression d’une sorte d’hédonisme exacerbé, une volonté de s’éclater dans le "bling bling" sans se préoccuper des conséquences.
Les lunettes à 12.000 euros
Il suffit de voir par exemple l’effet que peut produire sur des sympathisants de gauche le fait de comparer la ministre Fleur Pellerin à Laurence Parisot, ou encore sa façon d’évoquer un poste de Premier ministre pour son compagnon. C’est ravageur tant à gauche que dans l’opposition de droite, mais aussi dans la presse étrangère qui commence à s'intéresser à elle et Arnaud Montebourg, un couple décidément bien voyant.
Prenez enfin l’affaire des lunettes en écailles de tortue à 12.000 euros. Qu’elle repose ou non sur des faits avérés, je pense qu’Audrey Pulvar aurait dû répondre autrement que par des tweets provocateurs du genre "je fais ce que je veux de mon argent" et qu’il lui fallait démentir coûte que coûte.
Il y a dans cette attitude butée à laisser planer le doute comme un manque d’élégance, et surtout un refus de regarder autour de soi la réalité quotidienne que vivent les Français. 12.000 euros la paire de lunettes, c’est le prix d’une voiture moyenne gamme de chez PSA.
Au lieu de cela, Audrey Pulvar, associée à son compagnon Arnaud Montebourg, multiplie les maladresses et les coups d’éclat. Et qu’elle ne veuille ou non, elle en arrive à démontrer que les années "bling bling" sont d’une certaine façon encore au pouvoir. Et que l’arrivée de François Hollande n’y a rien changé.